Pensées numériques (4)

Il est temps de fonder une "discipline" dédiée à la réflexion sur les phénomènes numériques et leurs incidences sociologiques, pédagogiques, culturelles, etc

 

 

« Les belles infidèles » George Mounin , en analysant les processus  de la traduction…..

Si l’on pratique un petit jeu de traduction :

On traduirait "مواقع التواصل الاجتماعي" par "Sites de communication sociale", mais cette traduction, on le sait, ne correspond ni à la formule anglophone « social media » "الوسائط الاجتماعية" ni la version francophone « réseaux sociaux » "الشبكات الاجتماعية" .  L’insertion des mots « site » et « communication » serait, en effet, à la fois incompréhensible et erronée; les concepts et les mots renvoient, comme on le sait, à des réalités et à des sens ; donc, plus  précision conceptuelle il y a, plus usage correct et fiable il y a.

La désignation par « site » et par « communication » serait approximative pour les raisons suivantes :

  1. Les réseaux sociaux, identifiés ainsi, ne sont pas des sites mais des plateformes ; grosso modo, un site propose des contenus qui peuvent ou non être complétés par les usagers alors qu’une plateforme est un espace digital qui développe et valorise des contenus (savoirs, idées, etc.) qu’elle ne crée pas, ce sont les utilisateurs qui le font ; seulement, la plupart des contenus illimités et protéiformes produits  par la plupart des  internautes sur ces plateformes ne seraient ni contrôlés ni contrôlables, ni vérifiés ni complétement vérifiables, il se peut que ces utilisateurs ne soient pas tous aptes à produire du contenu valide, fiable, productif, etc. d’où la prolifération des fake news, des futilités, des platitudes, du copier-coller, du plagiat, du remplissage, des chinoiseries, des redites, etc. il faut jeter un coup d’œil sur les pages personnelles ou gérés par des groupes, qui sont ouvertes, pour voir l’ampleur des divergences, des échauffourées verbales et des escarmouches sémantiques.

  1. La communication est un comportement ou une attitude sociale censée mieux aider à comprendre l’autre, à mieux dialoguer avec lui, à se partager des idéaux nobles, à préparer un destin commun, etc. Sur les réseaux sociaux, par contre, le type de «  communication » (l’emploi de ce mot est ici à revoir) renvoie par contre dans la plupart des cas à des dialogues de sourds, à la complaisance mutuelle, à l’alignement amical ou professionnel inconditionnel, au sarcasme aller-retour, au cynisme, aux insultes réciproques, au rejet biparti de la différence, etc.

La clarification conceptuelle des espaces digitaux  utilisés, doublée d’une lecture des contenus à travers des « lunettes stérilisées », sont des entrées fondamentales (parmi d’autres) pour l’installation d’un esprit critique et d’un esprit d’analyse. Il ne sert à rien de le crier à la cantonade ou de le revendiquer à tue-tête dans les spots publiés ou dans les commentaires lacunaires, alors que l’utilisation initiale de l’espace en question est consommée sans réflexion.

Pédagogiquement, au niveau de l’apprentissage ou au niveau de l’usage des outils numériques, notamment lors des formations à l’usage sécurisé du web, il serait instructif de montrer aux élèves, à travers des exemples concrets, le fonctionnement des sites et des plateformes, la nature des propos et des idées publiés, les mécanismes de la construction des discours (linguistiques, rhétoriques, socio-culturels, etc.). il est fondamental de les outiller contre toutes sortes de manipulation.

Date de dernière mise à jour : 30/06/2020

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